Lorsque nous coupions à travers la baie de la Reine Maud, au sud et à l’est de l’île Victoria, nous avons navigué dans les eaux intérieures du Canada ou, selon le pays que vous interrogez, un détroit international. Mercredi matin, l’un de nos experts résidents du Nord, le colonel Pierre Leblanc, retraité des Forces canadiennes, nous a conduit à travers l’évolution de la réalité géostratégique du Grand Nord canadien.
Certains, notamment les États-Unis, ne partagent pas la position du Canada selon laquelle les détroits et les goulets du Passage du Nord-Ouest sont nos eaux intérieures. Le Canada appuie, en partie, notre demande de souveraineté sur l’occupation traditionnelle des Inuit de la banquise. Le point de vue américain est que c’est un détroit international, une désignation qui implique un droit de passage inoffensif, à la fois par mer et dans les couloirs aériens au-dessus. Comme le colonel Leblanc nous a dit mercredi, nos deux pays ont décidé dans les années 1980 que les navires américains aviseraient les autorités canadiennes avant de prendre le passage, même si la question de son statut juridique n’a pas été résolu. Nous nous sommes mis d’accord, pour le moment, sur notre désaccord.
« La souveraineté implique une démonstration de propriété » nous a dit le Capitaine Rothwell plus tard dans la journée de mercredi. «Cela signifie relever, cartographier, avoir une présence, et être prêt à répondre. » Ces tâches sont au cœur du mandat de la Garde côtière dans l’Arctique et la rend digne de l’héritage des premières expéditions du Canada vers le Nord alors inconnu, dont nous célébrons l’un des centenaires cette année.
En regardant au-delà du détroit de Larsen lorsque nous avons navigué vers le détroit de Peel, mercredi soir, nous nous sommes rendus compte à quel point il est facile de se sentir seul ici. Pourtant, nous ne le sommes jamais. À mesure que les progrès technologiques permettent le développement des ressources supplémentaires au sein de l’autorité des états Arctiques ; sujet de la présentation de l’experte en loi polaire Dr. Natalia Loukacheva cette semaine ; le partage des bénéfices circumpolaires et des charges du développement économique Arctique seront d’autant plus un défi diplomatique.
Tout ceci laisse supposer un rôle plus important pour le Conseil de l’Arctique, un forum diplomatique central de la région. Créé en 1996, le Conseil fournit un lieu pour la coopération internationale sur la protection de l’environnement et du développement durable. Depuis 2011, le Conseil a facilité la signature de deux accords juridiquement contraignants: l’un sur les opérations de recherche et de sauvetage maritimes et aériennes dans l’Arctique, l’autre sur la préparation et la réponse en cas de déversement de pétrole et de pollution.
Le Canada a assumé la présidence du Conseil de l’Arctique pour un mandat de deux ans en mai. La politique étrangère pour l’Arctique du gouvernement fédéral, annoncé en 2010, stipule «la poursuite d’un Conseil de l’Arctique renforcé» parmi les priorités stratégiques du Canada. Rarement avons-nous reçu une telle opportunité diplomatique.
Jamais, depuis les premiers explorateurs du Canada qui ont descend le fleuve Fraser rugissant jusqu’à la mer, une région a-t-elle recélée autant de promesses en étant si vulnérable. Nous avons maintenant à diriger le forum diplomatique qui peut guider le progrès collectif du monde vers une prospérité durable dans l’Arctique. C’est une occasion unique à ne pas prendre à la légère.
Parce que, tandis que la nuit tombe autour du Louis, dans ces eaux arctiques solitaires, il peut être trop facile d’oublier: dans cette partie du monde, le Canada n’est jamais seul, et il est maintenant temps que nous prenions la direction des choses.